SAMIR AMIN, UN PROTAGONISTE DE LA GÉOPOLITIQUE DES SAVOIRS

SAMIR AMIN, UN PROTAGONISTE DE LA GÉOPOLITIQUE DES SAVOIRS

Télécharger l’article L’histoire de la pensée économique retiendra le nom de Samir Amin comme celui d’un penseur critique majeur du système capitaliste mondial, à partir surtout des contextes historiques, économiques et politiques des sociétés africaines, saisis et rendus par une grille d’inspiration marxiste. En critiquant le système capitaliste mondial qui perpétue la dépendance économique des pays du Sud, Samir Amin a contribué à critiquer l’eurocentrisme épistémologique et à construire des connaissances économiques et sociopolitiques alternatives par rapport à celles produites par des théoriciens formatés par le paradigme néolibéral. Aussi Lewis Gordon a-t-il écrit, à juste titre, « Amin understood, in a long tradition of African thinkers, the centrality of the contingent and the uncertain ». Samir Amin a montré que le capitalisme, dans ses différentes transformations, engendre la polarisation du monde et des inégalités. Par ailleurs, le capitalisme, tel qu’il existe réellement, rend utopique la mondialisation par le marché, puisqu’il se fonde sur un marché tronqué qui, s’il favorise la circulation des capitaux et des marchandises, se heurte à l’inexistence du marché mondial du travail. La multiplication et le renforcement des frontières politiques d’État entravent la libre circulation des personnes, même pourvues des qualifications et  des compétences, et, par conséquent, la constitution du marché mondial de travail. La montée des populismes, le retour des nationalismes et le glissement vers les fondamentalismes et les intégrismes religieux rendent plus importantes les politiques migratoires que la construction d’un marché mondial du travail2. Face au désordre total et au développement inégal induits par le système capitaliste mondial, Samir Amin pensait qu’il fallait essayer l’hypothèse de la déconnexion. Il s’agissait, selon le penseur d’une déconnexion du système des critères de la rationalité des choix économiques par rapport au système des critères dérivés de la soumission à la loi de la valeur mondialisée propre au capitalisme mondial. Conçue notamment comme une nécessité politique logique imposée par le caractère inégal de développement du capitalisme et une condition nécessaire de l’avancée du socialisme dans le monde, la déconnexion impliquerait de distinguer la loi de la valeur tout court de la forme spécifique que représente la loi de la valeur mondialisée. La loi de la valeur tout court impliquerait que les rémunérations du travail soient, partout à travers le monde, égales à la productivité égale Télécharger l’article